Inquiétudes majeures concernant le sort des prisonniers d'Evin en Iran : « Le moment le plus impuissant de ma vie »


Un grand choc a eu lieu hier pour de nombreux Iraniens dont des proches sont emprisonnés dans la tristement célèbre prison d'Evin, où sont incarcérés de nombreux opposants au régime de Téhéran. Cette prison a été attaquée hier par Israël. Mehraveh Khandan, qui vit à Amsterdam, est très inquiète pour son père, emprisonné à Evin depuis des mois. « C'était le moment le plus désespéré de ma vie. »
Le père de Mehraveh, Reza, est détenu à la prison d'Evin, au nord de Téhéran, la capitale iranienne, depuis décembre, a- t-elle déclaré au journal britannique The Guardian . Reza a été arrêté en raison de son travail de militant des droits de l'homme.
Il était clair qu'il n'allait pas bien pendant tout ce temps. Jusqu'à récemment, elle parlait à son père en appelant d'abord sa mère en Iran, qui plaçait deux téléphones côte à côte pour permettre au père et à la fille de se contacter. Depuis l'attaque, cela n'est plus possible.
« L'un nous enferme, l'autre nous bombarde »Les images des médias iraniens, comme l'agence de presse Tasnim , montrent clairement les dégâts causés par les attaques israéliennes sur ce tristement célèbre complexe pénitentiaire. Des parties des bâtiments ont été détruites, tout comme le portail d'entrée. De nombreuses personnes ont fui la capitale iranienne la semaine dernière, mais pour les nombreux prisonniers d'Evin, cela est impossible.
« Pour moi, c'est la description la plus claire de notre situation en tant qu'Iraniens », déclare Mehraveh. « Un camp nous enferme pour que l'autre puisse nous bombarder. »

Mehraveh n'est pas le seul Iranien à l'étranger dont la famille est détenue et torturée par le régime strict. Un exemple bien connu est celui du professeur irano-suédois Ahmadreza Djalali (photo ci-dessus), détenu à Evin depuis 2016 et qui a perdu plus de 20 kilos depuis. Le mois dernier, il a été victime d'une crise cardiaque dont il a survécu de justesse. Les soins qu'il a reçus par la suite ont été minimes.
Ahmadreza a été condamné à mort en 2016 après s'être rendu en Iran pour donner une série de conférences. Il a été reconnu coupable d'espionnage au profit d'Israël lors d'un procès-spectacle. Auparavant, il avait enseigné la médecine de catastrophe en Suède et en Belgique. Ces deux pays ont tenté à plusieurs reprises de le faire libérer, sans succès jusqu'à présent.
TortureL'ancien professeur a été torturé, notamment enfermé dans une cellule éclairée 24 heures sur 24. Il devait dormir à même le sol, avec pour seule couverture une petite couverture. Amnesty International avait précédemment déclaré à RTL Nieuws qu'il était détenu comme monnaie d'échange politique pour les prisonniers iraniens en Belgique et en Suède.
L'état de santé actuel de Reza et Ahmadreza est inconnu. Des prisonniers légèrement blessés ont été signalés, mais ces informations n'ont pas encore été confirmées par les autorités iraniennes.

« La prison d'Evin est malheureusement un nom familier », déclare Elke Kuijper d'Amnesty International. « C'est un endroit incroyablement tristement célèbre, principalement en raison des mauvaises conditions de détention. Les gens y sont maltraités, privés des soins médicaux dont ils ont besoin. Des personnes y sont exécutées ou meurent sous la torture. »
Pepijn Nagtzaam, correspondant au Moyen-Orient, confirme les conditions de détention épouvantables. « C'est le symbole de l'oppression de son propre peuple par le régime iranien. Des personnes y disparaissent pendant de longues périodes, parfois pour toujours. Elles sont détenues dans des cellules bien trop petites ou avec beaucoup trop de personnes dans une même pièce. »
Prisonniers politiquesDe nombreux prisonniers de la prison d'Evin sont des prisonniers politiques. Par exemple, ils se sont rebellés contre le régime iranien lors des grands soulèvements qui ont éclaté fin 2022 après la mort de la jeune Iranienne Mahsa « Jina » Amini. Elle est morte dans sa cellule après avoir été emmenée par la police iranienne pour ne pas avoir porté son foulard, conformément aux directives de l'État.
« De nombreux penseurs critiques y sont enfermés », explique Kuijper. « Parmi les intellectuels, on l'appelle parfois, à moitié en plaisantant, l'Université de Téhéran, car on y entend beaucoup de voix critiques contraires. »
Malgré le fait que de nombreuses personnes soient injustement emprisonnées à Evin, Kuijper est conscient qu'on n'attaque pas une prison. « C'est une cible civile. L'attaquer pourrait être un crime de guerre. On ne sait pas quels dégâts on cause. »
Flexion musculaire iranienneKuijper dit comprendre et partager les inquiétudes d'Ahmadreza et des proches de Reza. « Nous constatons que l'Iran a arrêté de nombreuses personnes ces derniers jours qui, selon le régime, espionnaient pour le compte d'Israël. L'Iran veut montrer ses muscles pour envoyer un signal : "Ne faites pas ça, on vous aura." »
La semaine dernière, deux personnes ont déjà été exécutées, l'Iran les accusant d'espionnage pour le compte d'Israël. « Le problème, c'est qu'en Iran, les accusations sont souvent formulées de manière vague, parfois totalement infondées, et que les aveux sont obtenus sous la torture. Ce type de procès suscite donc de nombreuses interrogations. Nous craignons pour le sort des personnes emprisonnées depuis longtemps comme pour celles qui viennent d'être arrêtées. »
Les exécutions en Iran ne sont pas rares. Rien que l'année dernière, au moins 901 exécutions auraient eu lieu, selon les chiffres de l'ONU. Seule la Chine connaîtrait un nombre d'exécutions annuel plus élevé, bien qu'il n'existe pas de chiffres officiels pour ce pays.
Le nombre de 901 reste un minimum. Selon diverses organisations de défense des droits humains, ce chiffre pourrait même atteindre 975. En 2023, selon Amnesty International, ce nombre serait encore de 853.
Cette tendance à la hausse devrait se poursuivre jusqu’en 2025. Plus de 300 personnes auraient été exécutées jusqu’à présent.
En octobre 2022, nous avons rencontré Yasmijn Fataie, née dans la tristement célèbre prison d'Evin. Découvrez son histoire dans la vidéo ci-dessous :
RTL Nieuws